N. Djokovic : récit d’une année Extra Ordinaire
Parce que cette année est en tout point différente des précédentes, je reviens cette semaine sur la saison de Novak. Vraiment à part, elle est à classer dans un autre registre que les précédentes…
🔘 Chapitre 3 : Si prêt, si loin…
Tout est permis. Tout rêve est permis. Oui, avec ce Novak on peut rêver. Invaincu depuis le début de l’année en Grand Chelem, une première depuis 1969, le Serbe est en passe d’écrire la légende de son sport. Ces deux derniers mois ont changé la donne. À présent, le n°1 mondial ne court plus derrière les records, il les écrit.
Et cette quête commencera par les J.O. En cas de titre à Tokyo, le Serbe serait en passe, un mois plus tard, de réaliser le Grand Chelem doré à l’US Open. Sur le circuit masculin, personne n’a réalisé une telle performance.
Mais Novak hésite. Il vient d’enchainer les tournois. Certes il est bien plus facile d’enchainer les matchs lorsqu’on gagne mais le Serbe à 34 ans. Il connait son corps mieux que quiconque et ne voudrait pas avoir les yeux plus gros que le ventre…
Pour ne rien arranger, une nouvelle décision sanitaire vient de tomber. A Tokyo, les athlètes devront faire sans public :
les Jeux Olympiques qui débutent fin juillet dans l’archipel seront à huis clos.
«Je vais devoir y réfléchir. Mon plan a toujours été d’aller aux Jeux olympiques, mais en ce moment, je suis un peu divisé. C’est un peu 50–50 à cause de ce que j’ai entendu ces derniers jours.»
Finalement, c'est à travers un message d'anniversaire pour un de ses jeunes fans japonais que Novak Djokovic mit fin au suspense.
Oui, le Serbe sera bien à Tokyo pour disputer les Jeux Olympiques.
L’écho de ses derniers exploits a bien sûr retenti dans le monde entier. À peine arrivé au Japon et bien malgré lui,
Nole est LA star du village olympique. Le Serbe multiplie les photos et selfies avec les athlètes désireux de ramener un cliché d’eux avec le n°1 mondial comme souvenir...
Aligné également en double mixte, Djokovic annonce la couleur : il vise l’or et rien d’autre.
«Je pense que mes préparatifs ont été bons. De plus, j’ai gagné beaucoup de matchs récemment, ce qui vous donne toujours plus de confiance et d’énergie. Jouer pour mon pays, c’est le plus grand honneur et privilège pour moi. Je suis un athlète individuel, nous avons rarement l’opportunité de jouer en équipe. Je suis reconnaissant parce que nous avons pu gagner l’ATP Cup et la Coupe Davis, et il me manque maintenant l’or olympique. J’ai les plus hautes ambitions à Tokyo, ce n’est un secret pour personne que je vise la médaille d’or.»
H. Dellien son premier adversaire n’y changera rien. En une heure de jeu, le Serbe vient de se qualifier pour le deuxième tour. Il lance ainsi parfaitement son tournoi olympique.
Dans le même temps, le n°1 mondial vient d’affronter les conditions dantesques du tournoi. Entre la chaleur et l’humidité, "ce sont les conditions les plus difficiles dans lesquelles il n’a jamais joué". Voilà un adversaire supplémentaire pour le Serbe…
Malgré tout, Djokovic continue de jouer au rouleau compresseur. Sans perdre le moindre set, il en enchaine les matchs. Son premier test annoncé en quart de finale face au local K. Nishikori n’en sera pas un. Le suspens tourne court, deux sets et une bulle. Rien n’arrête Novak.
Le voilà en demi-finale.
Est-ce qu’il y a un avant / après 29 juillet pour le Serbe ? Certainement.
On ne va pas se le cacher. A cette instant T de l’année, Djokovic est inarrêtable, même en double mixte où il vient de décrocher, aux côtés de Nina Stojanovic, une place en demi-finale.
On connait la suite. Pour les fans elle fait très mal car, comme souvent, elle est inattendue.
Et pourtant tout avait bien commencé dans cette demi-finale aux faux airs de finale…
Face à A. Zverev, le n°1 mondial menait les débats. Vainqueur large du premier set, il venait de prendre le service de son adversaire.
Le vent en poupe, Djokovic filait tout droit vers son rêve.
Mais ce 6ème jeu du deuxième set sera le tournant du match.
A. Zverev, porté par l’ énergie du désespoir, remettait de la vie dans son tennis. De son côté, Novak enchainait les erreurs et les mauvaises prises de décisions. Débreak de l’Allemand.
À partir de cet instant, c'est Zverev qui fut le patron sur le court et Djokovic perdit peu à peu la sérénité affichée jusque-là. Le n°1 mondial ne marquera quasiment plus un jeu jusqu’à la fin de la rencontre.
Il venait d’exploser en vol, ses espoirs d’or olympique avec.
Battu la même journée en double mixte,
la suite du tournoi n’aura plus la même saveur pour le Serbe. Ce match pour le bronze face à P. Carreno Busta restera anecdotique. Ce n’est pas ce que le Djoker était venu chercher. Et pour ne rien arranger, Nole, touché à une épaule, déclara forfait quelques minutes après pour le double mixte où il jouait également la médaille de bronze avec N. Stojanovic.
C'est un petit séisme sur la planète tennis. Venu au Japon avec un statut d'intouchable et l'ambition de poursuivre sa quête de "Golden Slam", Novak Djokovic s'est écroulé à la surprise générale…
«J'ai un seul regret : ne pas avoir gagné de médaille pour mon pays. Hier et aujourd'hui, mon niveau de tennis a chuté. J'ai donné tout ce qui me restait dans le réservoir, ce qui était peu. Je ne regrette pas du tout d'être venu aux Jeux Olympiques, bien sûr que non. J'ai connu des défaites déchirantes aux JO et dans des grands tournois tout au long de ma carrière et je sais que ces défaites m'ont généralement rendu plus fort, à tout point de vue. Je sais que je vais rebondir.»
Rendez vous aux J.O de Paris 2024 pour le n°1 mondial. Ce sera très certainement sa dernière chance de remporter l’or Olympique.
Après cet accident de parcours. Il faudra vite se relever pour le Djoker.
L’Us Open, dernier opus de la saison, commence dans un mois. Et il peut encore rêver très grand : aller chercher le Grand Chelem calendaire. Un exploit rarissime dans l’histoire du tennis.
Et c’est sans surprise que Novak va commencer sa préparation par… du repos. Après l’épisode de Tokyo, Nole veut se vider la tête et prendre du temps avec ses proches.
Il zappera logiquement Toronto et quelques jours plus tard Cincinnati, indiquant que sa récupération est "plus longue que prévue."
Depuis 1990, aucun joueur n'a remporté l'US Open sans jouer un match lors de la tournée estivale nord-américaine. Voilà le défi qu’attend désormais N. Djokovic…
Sous le feu des projecteurs, c’est comme ça qu’il sera accueilli à Flushing Meadows.
Le "Golden Slam" se lit sur toutes les lèvres et n°1 mondial doit gérer toute cette attente qu’il a autour de lui.
Quoi qu’il arrive, on sent que cette édition sera unique.
«Évidemment, j'ai conscience de la grande opportunité qui s'offre à moi. C'est probablement le court le plus spectaculaire du circuit et le public sera de retour. Pour être franc, je suis vraiment motivé pour jouer mon meilleur tennis. C'est un rêve de gagner un titre ici qui bouclerait le Grand Chelem calendaire. Mais il faut taper une balle à la fois. Je dois rester dans le moment présent, suivre mon étoile.»
Et pour aller au bout il faudra jouer son meilleur tennis.
En son absence, les jeunes loups ont pris le pouvoir. Medvedev, vainqueur à Toronto, et Zverev, à Cincinnati, seront ses deux principales menaces. Le tableau a placé l’Allemand dans la même partie que le n°1 mondial…
Avant cela, Novak doit reprendre ses marques et a besoin de jouer des matchs. Disparus des courts depuis les J.O, il commencera son tournoi face à H. Rune, un jeune Norvégien de 18 ans.
Malgré la perte d’un set, Djokovic ne tremblera pas sur ce match. Bien aidé par son service,
il enchainera une 22ème victoire consécutive et se qualifiera au 2ème tour. Sans surprise.
Ses matchs par la suite seront très similaires. De K. Nishikori au 3ème tour à M. Berrettini en quart, tous prendront le premier set du match. Puis, Novak passera inéluctablement la vitesse supérieure et ne laissera que des miettes dans les sets suivants.
Face à l’américain J. Broosby, en huitième de finale, l’exemple sera criant.
Il y a eu ce premier set, perdu 6-1, que le n°1 mondial a traversé comme un fantôme et ce jeu hallucinant de 20 minutes, au début du 2ème set où l’Américain reprit le service du n°1 mondial. Cri de rage et foule en délire.
Derrière Novak est redevenu Novak et n’a plus rien laissé en route. Une fois encore. Pendant le match, A. Roddick, une ancienne légende américaine déclara : “D’abord, il prend vos jambes, Puis il prend votre âme”.
Djoko était tout simplement en mission. En quart de finale, le malheureux Matteo en fera les frais également. Opposé une 3ème fois cette année face à Djoko en Grand chelem, le scénario se répétait. L’Italien gagnait la première manche, en près d’1h20 puis explosait.
Comme si chaque joueur, après avoir donné tout ce qu'il pouvait dans le premier acte, se retrouvait le réservoir à sec pendant que Nole, de son côté passait au régime supérieur…
Voilà Djokovic, mental d’acier et poing rageur, à 2 victoires de l’exploit...
L’avant dernier obstacle sera A. Zverev… L'Allemand, restait sur une série de 16 victoires entre les JO, Cincinnati et cet US Open. Il avait brisé le rêve du Serbe au même stade de la compétition à Tokyo. Pour Novak, nul doute qu’il voudra sa revanche.
Et comme ses matchs précédents, Novak lâchait le 1er set. Mais le n°1 mondial avait prévenu son cadet : New York, ce n'était pas Tokyo. Ce n'était pas un match au meilleur des trois manches. Et en effet, Il lui en restait encore deux à gagner… et Djokovic profita d’une baisse de l’Allemand pour empocher le 2ème set.
La suite fut bien plus compliquée pour le n°1 mondial. Sur courant alternatif, Novak défendait régulièrement ses jeux de service. Son coup de force a été de prendre sa proie dans ses serres lors du troisième set, premier moment charnière du match.
Il prit le service de Zverev pour s’adjuger le set et prendre les commandes du match.
À nouveau en mode mi-figue, mi-raisin dans le 4ème acte où il lâcha son service à 1-1 de manière un peu impromptue, le Serbe en a vu de toutes les couleurs. Mais, malgré la perte du set, il n'a jamais senti qu'il était inférieur à son adversaire et tout ça sans forcément produire son meilleur tennis.
Le 5ème set fut une balade Djokovienne. Une fois de plus il étouffait son adversaire. Un ultime break plus tard,
voilà le Djoker victorieux de son 27ème duel consécutif en Grand Chelem cette année.
Un duel gagné au mental car le navire a quand même tangué. Mais le capitaine Djoko arrive à composer avec les vagues sans avoir le mal de mer. C'est sa plus grande force.
Direction la finale ultime. « ALL IN » dira Novak après ce match.
«Je l'ai dit sur le court. Je vais jouer ce match comme si c'était le dernier. Parce que c'est sans doute le plus important de ma carrière. Il s'agira d'une bataille contre un autre gars qui est en très grande forme, Medvedev. Je sais ce que l'on attend de moi.»
Un match. Un seul match. Dans une carrière cela ne représente rien. Sur cette finale il en valait certainement 1000 pour Novak. Ces rendez-vous avec l’Histoire sont tellement rares, qu’une seule main suffit pour les compter. Pour le n°1 mondial, il y a eu Roland Garros en 2016 et il avait ce match cette année.
Novak Djokovic va connaître en entrant sur le court Arthur-Ashe, ce qu'aucun joueur n'avait plus connu depuis 52 ans. Une pression gigantesque.
Dès les premiers points de la finale, le Russe prenait la main dans les échanges du fond, répliquant à chaque tentative d'accélération de son illustre rival par des contres tout aussi percutants. Il ne laissa pas respirer le n°1 mondial. S’appuyant sur un service redoutable, et quasiment "imbreakable",
Medvedev faisait la course en tête.
Mais on le savait, gagner le premier set face à Novak ne constituait en rien un gage de victoire. A quatre reprises précédemment, Djokovic avait remonté ce handicap au cours de la quinzaine. Et quand il a mené 0/40 sur le service de Medvedev d'entrée de deuxième manche, obtenant ses premières occasions de break, il était tentant de penser que le scénario de sa demie contre A. Zverev pouvait se reproduire.
C'était sans compter sur la solidité mentale du Russe.
En deux jeux de service consécutifs, il écarta cinq opportunités adverses.
Cette fois, c’était terminé. Le Serbe ne reverra plus jamais le Russe. Privé de solutions du fond face à son miroir indébordable,
le numéro 1 mondial sombra, sans solutions.
C’en était trop. Même pour lui. Vidé physiquement mais surtout émotionnellement, Nole s’effondra dans sa serviette au dernier changement de côté. Le public scandait son nom. Enfin...
Djokovic n'aura donc pas tout perdu, il vient de gagner une reconnaissance populaire après laquelle il a couru pendant tant d’années, dans l'ombre de deux autres géants du jeu, Roger Federer et Rafael Nadal.
«Tout le soutien, l'énergie et l'amour que j'ai reçu du public, c'est quelque chose dont je me souviendrai toujours. C'est pour ça que j'ai fondu en larmes lors du dernier changement de côté. L'émotion et l'énergie étaient si fortes. C'est aussi fort que de gagner 21 titres en Grand Chelem. Ils m'ont touché au cœur. Bien sûr qu'en fin de compte, on veut gagner, en tant qu'athlète professionnel. Mais c'est ce genre de moments que vous chérissez. Ce sont des liens que vous créez avec les gens qui dureront très longtemps.»
Durant cette quinzaine, Nole aura lutté contre des adversaires accrocheurs certes, mais surtout contre la pression d'une telle quête et les émotions qui l'ont assailli.
Cette soirée, tout aura débordé pour lui car même si on peut en douter parfois, Novak Djokovic reste humain.
Les discussions sur les fiches de match vont devenir insupportables. Je n’aimais pas particulièrement Djokovic, mais je respectais le champion. Je respecte désormais l’homme, les gens oublient trop vite ce qu’il a fait dans sa vie et sa carrière. Courage à toi, hésite pas à donner quelques nouvelles (ou à créer un groupe avec des personnes de confiance pour discuter calmement ?) et (j’arrive pas à croire que je dis ça hahaha) AJDE !
Tu vas nous manquer Nolex Prends bien soin de toi surtout!